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Dermatose : la France suspend pour 15 jours ses exportations de bovins

Une réunion prévue mardi prochain à Bruxelles pourrait encore restreindre davantage les exports.

« Coup de massue » pour les éleveurs : face à la propagation de la dermatose nodulaire contagieuse dans les troupeaux bovins de trois régions françaises, le gouvernement a décidé de suspendre les exportations d'animaux vivants pendant quinze jours, mesure qui a fâché la FNSEA.

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En 2024, la France a exporté 940 000 broutards, des bovins de 4 à 15 mois destinés à produire de la viande, et 356 000 veaux de moins de deux mois de type laitier, selon les chiffres de l'Institut de l'élevage. Cela représente plus d'un milliard d'euros selon les chiffres agrégés des douanes, sur les 2,8 milliards d'euros générés en 2024 par les exportations d'animaux vivants et de génétique.

Ces animaux partent principalement en Espagne et en Italie pour être engraissés, pour parfois revenir en France à l'abattage. Ces deux pays frontaliers ont aussi enregistré des cas de dermatose nodulaire contagieuse, l'Italie quelques jours avant l'arrivée de la maladie en France en juin et l'Espagne plus récemment.

« Pour 15 jours, nous fermons les marchés à l'export. Il n'y aura pas de sortie d'animaux en dehors du territoire national », a confirmé la ministre de l'agriculture Annie Genevard en déplacement dans le Jura, où trois foyers ont été détectés ces dernières semaines.

La ministre avait réuni vendredi un « Parlement du sanitaire » (éleveurs, vétérinaires, spécialistes, autorités...), au cours duquel elle a annoncé un renforcement des contrôles et des restrictions de mouvement des animaux dans les zones réglementées autour des foyers.

Renforcement des contrôles et sanctions

La FNSEA, qui avait jusque-là soutenu toute la stratégie gouvernementale, s'est dit très surprise par la suspension des exportations décidée « sans concertation ».

Au moment où le syndicat dominant attendait des assouplissements pour exporter les jeunes bovins vaccinés depuis les zones réglementées, il ne comprend pas l'arrêt total des exportations sur l'ensemble du territoire.

« Nous appelons la ministre à revenir sur cette mesure », a déclaré à l'AFP le président de fédération nationale bovine (FNB) et vice-président du syndicat Patrick Bénézit, qui appelle le gouvernement a plutôt faire respecter sa stratégie précédente.

La vaccination sera « imposée » à ceux qui la refusent et les mouvements illégaux « sanctionnés » (amende ou refus d'indemnités d'abattage), a précisé vendredi la ministre. Les fêtes agricoles avec animaux et corridas sont interdites en France et les marchés à bestiaux dans les régions touchées.

Selon un communiqué du ministère, les foyers recensés dans l'Ain, dans le Rhône, dans le Jura ou dans les Pyrénées-Orientales, alors que l'épicentre de la maladie se situait en Savoie et Haute-Savoie, « résultent probablement de mouvements d'animaux, dont certains illicites ».

Pour la Confédération paysanne et la Coordination rurale, syndicats agricoles qui n'ont eu de cesse de dénoncer l'abattage total systématique et une réglementation « intenable », notamment pour ceux dont les bovins étaient coincés en altitude, il est « insupportable » d'accuser ainsi les éleveurs.

« C'est un coup de massue », a dénoncé Sylvie Colas, de la Confédération paysanne, troisième syndicat agricole.

Interdiction des rassemblements d'animaux

L'administration a expliqué lors de la réunion matinale prendre les devants avant une réunion mardi à Bruxelles, qui pourrait aboutir sur une décision encore plus stricte de restriction d'exports pour la France, raconte-t-elle.

Après des réunions avec les acteurs locaux, la ministre a revêtu une combinaison de sécurité pour assister à la vaccination dans un élevage de Montbéliardes de sa région natale, où l'on produit du comté.

« On est obligés (de prendre cette décision), parce que la Commission européenne nous regarde très attentivement », a-t-elle déclaré à la presse. « Mais si tout va bien dans 15 jours, ça pourra reprendre. Et on sait que l'Espagne et l'Italie attendent nos broutards. » Selon les syndicats, ces deux pays sont ouverts à l'importation de jeunes bovins vaccinés.

La Coordination rurale et la Confédération paysanne appellent donc à la vaccination de l'ensemble du cheptel français et pas seulement les zones réglementées.

Le gouvernement leur a opposé une fin de non-recevoir et a indiqué avoir commandé 800 000 vaccins à 1,40 euro l'unité (soit 1,12 million d'euros) pour un cheptel français de 15,7 millions de têtes, selon Sylvie Colas.

Le secrétaire national de la Coordination rurale Christian Convers ajoute qu'une réunion doit se tenir au ministère lundi pour discuter notamment de la vaccination et, il l'espère, de la stratégie d'abattage pour éviter les dépeuplements complets de foyers.

Sur les indemnisations des pertes de production - car la maladie a un impact sur la lactation des vaches tandis que les restrictions de mouvements et d'exportation creusent les trous dans les trésoreries des éleveurs - les « choses avancent », tout comme sur les dérogations accordées pour rentrer les bêtes en estive à l'étable, ajoute-t-il.

Il s'inquiète en revanche du repeuplement des troupeaux savoyards puisque les éleveurs devaient s'approvisionner notamment dans le Jura, désormais bloqué. En ajoutant le Jura au dernier bilan officiel, près de 2.000 bêtes ont été abattues depuis juin.

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